Petit retour sur mon activité de l’année écoulée. C’est la première fois que je m’adonne à cet exercice et je tiens à le rendre public. Par transparence, mais aussi comme un mode d’emploi de mon activité et de son cadre juridique qui ne sont pas toujours bien compris.
La formation
Je suis donc formateur à l’usage de logiciels libres dans le domaine du graphisme. Bien sûr, pas sur tous les logiciels, ni tous les métiers, j’y reviendrai. Je sais aussi utiliser un tas d’autres logiciels pour certaines activités que je pourrais proposer en formation. Mais, questions de priorités, d’envies et de compétences je ne propose pas de formation sur tous les logiciels que je sais utiliser, j’y reviendrai aussi.
Si vous voulez savoir comme je suis devenu formateur avec cette spécificité de n’utiliser que des logiciels libres, je vous renvoie à cet entretien.
En 2018, j’ai animé 33 journées de formation. Je fais le choix d’aller former les gens à proximité, voie sur leur lieu de travail, plutôt que de les faire venir dans les locaux d’Artéfacts à Tours ou Orléans (ce qui n’empêche pas d’animer des formations dans ces villes, comme vous pouvez le constater sur la carte). Cela m’a amené à voyager en France : Laon (Aisne), Tours (Indre-et-Loire), Lyon (Rhône), Plaisir (Yvelines), Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), Nantes (Loire-Atlantique), Lille (Nord), Orléans (Loiret), Richelieu (Indre-et-Loire) et Brioude (Haute-Loire). Ce qui veut dire que je n’hésite pas à me déplacer, y compris loin des centres urbains.Au niveau des sujets cela peut paraître un peu restreint :
- retouche d’images avec GIMP
- dessin vectoriel avec Inkscape
- mise en page avec Scribus
- tout le processus de mise en page : formation combinant les trois sujets précédents
- dessiner pour utiliser une machine de découpe à eau très haute pression : formation spécifique sur Inkscape
- initiation au montage vidéo avec Shotcut
GIMP et Inkscape ont cette particularité de concerner plusieurs métiers et activités différents. Ce qui peut les rendre plus difficiles à aborder, voire, pour Inkscape, à comprendre son utilité. Ce qui m’a conduit à commencer une série de vidéo sobrement intitulée « À quoi sert Inkscape ? ».
La coopérative
Pour exercer ce beau métier – oui, je trouve que c’est un beau métier dans lequel je prends beaucoup de plaisir – j’ai un statut d’entrepreneur-salarié-associé (ESA) dans une coopérative d’activités et d’emploi (CAE, une forme de Scop), en l’occurrence Artefacts en région Centre – Val de Loire. Certains pensent que je suis auto-entrepreneur. Cela n’a rien à voir !
Tout d’abord, je suis salarié et même en CDI, contrat se raréfiant en ces temps de casse du code du travail. Mais je suis aussi sociétaire, c’est-à-dire que je prends part à la gouvernance de la coopérative, comme beaucoup de mes collègues. En fait, depuis 2016 et l’application de la loi Hamon, tout salarié de Scop doit devenir sociétaire dans les trois ans, ou partir.
Je ne fais pas partie d’une association. Une association est généralement à but non lucratif, une Scop est une entreprise commerciale dans l’obligation de réaliser des profits. Ça fait tout de suite moins éthique… Mais tout dépend de ce que l’entreprise fait de ses profits, et c’est là que c’est important que les salariés soient également propriétaires de l’entreprise. Par exemple, chez nous, aucun dividende n’est versé, les bénéfices vont soient en réserve dans l’entreprise, soient aux salariés (qu’ils soient sociétaires ou non).
Je suis plutôt libre de mes choix, c’est le côté entrepreneur de l’ESA et l’aspect qui peut entraîner la confusion avec un auto-entrepreneur (l’aspect financier également). Je choisis donc les activités que je souhaite développer en bénéficiant tout de même des conseils des accompagnateurs de la coopérative (différence avec l’auto-entrepreneur qui reste tout seul). Cependant mes actions sont limitées du fait qu’elles engagent la coopérative.
Le salaire reste l’aspect précaire de ce statut. En effet, le salaire est calculé en fonction du chiffre d’affaire généré par chaque coopérateur : nous avons donc tous des salaires différents. Au début, le salaire peut même être très faible. J’ai moi-même débuté avec un salaire net de 228 € par mois. Merci Pôle emploi de m’avoir soutenu à cette époque.
Et les finances dans tout ça !
Cette année j’ai réalisé un chiffre d’affaires d’environ 28300 € (toutes les sommes mentionnées ici sont évidemment hors TVA). Ce fut la première année où j’ai pu me payer à plein temps toute l’année (en 2017, je n’étais pas passé loin). Pour pouvoir me payer à plein temps toute l’année au SMIC il me faut un chiffre d’affaires d’environ 25000 €.
Sur ce chiffre d’affaires je déduis 10 % pour financer l’équipe d’appui de la coopérative, c’est-à-dire les personnes en charge de l’accompagnement, de la gestion et de la comptabilité.
J’ai parfois entendu dire que cela pouvait être pénalisant de donner 10 % de son chiffre à la coopérative, voire que nous, entrepreneurs-salariés seraient pénalisés par rapport aux entreprises classiques. Or, cette participation permet de financer des services que nous aurions à assumer si nous étions indépendants. De plus, une entreprise classique consacre une part non négligeable de son chiffre d’affaires à payer ces tâches « non-productives » mais néanmoins indispensables. Une entreprise bien gérée y consacre un équivalent temps-plein (ETP) sur cinq, soit 20 % du chiffre d’affaires. En tant qu’ESA nous ne consacrons que 10 % à ces tâches, même si en réalité certaines sont effectuées par les coopérateurs eux-mêmes (édition des devis, factures, notes de frais, prospection, communication, etc.)
Sur les 90 % restants je déduis mes frais (téléphonie, internet, papeterie, etc.) et mes achats liées à des missions précises, des formations la plupart du temps (déplacement, hébergement, restauration).
Le reste constitue mon salaire : la part indirecte composée des cotisations sociales et la part directe que l’on appelle salaire net.
Calculer les tarifs
Qu’est-ce que cela induit sur la facturation ? Ou, présenté autrement, comment calculer mes tarifs pour atteindre l’objectif des 25000 € annuels ? Il m’est toujours difficile de définir des tarifs équilibrés, du moins pour les autres prestations que la formation. Faut-il facturer le temps passé, un forfait pour la prestation, un montant au doigt mouillé ?
J’ai un indicateur (qui vaut ce qu’il vaut) qui est le plancher en-dessous duquel je ne dois jamais descendre, à moins d’accepter de faire du bénévolat. Prenons un budget annuel de 24000 € (pour faire simple). Par mois cela fait 2000 €. On compte généralement vingt jours de travail par mois, mais il est illusoire de penser que je puisse facturer tous mes jours de travail. Disons donc, dix jours facturables, ce qui reste très optimiste. Cela place mon plancher à 200 €/jour. Entendons-nous bien, il ne s’agit pas d’un objectif mais d’une ligne rouge en-dessous de laquelle il ne faut pas descendre. Cela donne un ordre de grandeur : idéalement la journée devrait être facturée 300 €, voire même 400 pour être plus confortable. Sachant que j’envisage, à court terme, de pouvoir gagner un peu plus que le SMIC…
Ainsi, lorsque je passe une demi-journée à installer et configurer un ordinateur sous Linux, je devrais facturer au minimum 100 € (soit 120 € TTC) et idéalement 200 € (240 € TTC). Heureusement, ce n’est pas mon activité principale.
Cela dit, le chiffre d’affaires provenant de la formation professionnelle représente plus de 91 % du total. Si j’avais des doutes sur les « orientations stratégiques » à prendre, les voici dissipés. Les presque 9 % restants se répartissent sur des travaux d’impression, du développement d’une extension pour WordPress, d’un site Web et d’une heure de conseil.
Je poursuivrai sur les perspectives et envies pour l’année qui vient dans un nouvel article du blog. À très vite !